mardi 9 août 2011

Le côté clair de la force : Montego Bay

Après avoir passé quatre jours à la campagne puis quatre jours dans "le bush" à jouer à Mimi Cracra ou Tarzan, après avoir vu la Jamaïque du dedans, après avoir même appris quelques mots de Patwa (le créole Jamaïquain)... je me suis inexplicablement retrouvée éjectée dans un monde de luxe et d'opulence sur la côte Nord-Ouest du pays à Montego Bay!

L'excuse était un meeting de couch-surfers. Couch-surfing est, au cas où ça ne serait pas encore bien clair, un réseau internet où on offre un toit gratuitement aux globes trotteurs du monde entier. C'est également un moyen de rencontrer la population locale ou les voyageurs voisins :)

Nous voici donc à Mo. Bay (pour les intimes), chez Nicolas, un couchsurfer Péruvien qui nous hébergea pour l'occasion avec mon accolyte Sammi. Nicolas bosse pour une entreprise Américaine, vit dans une résidence avec piscine, air conditionné, eau chaude et a une voiture...

Ultra top luxe!!!!

Mais ce n'est pas tout, Nicolas nous a fait entrer gratuitement dans un hotel-palace 5 étoiles "all inclusive" pour l'après-midi... C'est-à-dire COCKTAILS et NOURRITURE A VOLONTE!!!! Et puis plage, piscine, transats, fauteuils en cuir, serveurs qui sont à nous petits soins et tout le tin-toin.

Autant vous dire qu'avec Sam on en a usé et abusé ;)

Ensuite, comme on a le c** bordé de nouilles, un des couchsurfer qui assistait à la petite fête avait un voilier et nous a tous emmené naviguer le temps d'une journée... Nous étions onze à bord : allemands, américaine, péruvien, jamaïquains, coréens et française! On a fait bronzette, on a fait trempette, on a jeté l'ancre près d'une plage où il n'y avait que des jamaïcains, on a participé à des jeux avec eux... on a sur-kiffé!

Voilà, pas très poétique ce post mais ce fut la débandade et ça fait du bien parfois ;)




Carte postale...?!

Cognac!! (pour digerer :p)

couchsurfing fiesta!




Un des plus beaux jours de ma vie : Pelican's bar


Le lendemain de notre première nuit, Tony proposa de nous emmener "je n'ai pas bien compris où sur le moment", mais le seul fait de le voir avec suffisemment d'énergie pour proposer un voyage à la plage et la perspective d'y retrouver Sammi accompagnée de quatre de ses amis autrichiens me remplit d'enthousiasme malgré la chaleur étouffante!

Cette journée fut PAR-FAITE, et pas seulement pour la beauté sans nom de l'endroit où Tony nous emmena mais aussi pour tous les à-côté : le voyage à l'arrière du pick-up sous le soleil avec mon i-Pod et de la salsa à fond les ballons, les rivières, le lagon, la pureté du vert de la plaine, cet énorme poisson que l'on partagea en quatre à midi... puis le retour à l'intérieur du pick-up cette fois-ci, de nuit, à pencher la tête par la fenêtre pour admirer le ciel rempli d'étoiles en écoutant les vieux tubes folks de Tony...

Quand au Pelican's bar en lui-même, ça se passe de commentaires te ça se résume en sept lettres :

P

A

R

A

D

I

S


















COEUR DE PIERRE : Accompong & Baboo's garden


Petite baignade sur la route entre Elim et Accompomg

A couper le souffle...

Mon chateau!

Me voilà sur un des meilleurs spots que j'ai jamais eu pour écrire, je le place dans le top-3 derrière la steppe Mongole et le lac Baikal : je suis sur la terrasse de mon château au sommet de la montagne en pleine jungle jamaïcaine! Ca en jette hein?

Après la petite communauté d'Elim chez Sammi j'avais décidé d'aller chez une autre couchsurfeuse à côté de Port Antonio, à l'extrême opposé de l'île. Seulement, pour arriver à bon port il m'aurait fallut prendre un taxi jusqu'à Santa Cruz, un bus jusqu'à Nine miles à Kingston, un autre taxi jusqu'au terminal de bus de Half Way Tree toujours à Kingston, un second bus jusqu'à Port Antonio et un dernier taxi jusqu'au village de destination. Tout en sachant que chaque trajet en bus durait trois heures, qu'il fallait que j'arrive avant la nuit qui tend à poindre vers 18h (ne me demandez pas d'où j'ai sorti ce "tend à poindre" mais il est venu si naturellement qu'il mérite de rester sur cette page!), sous une chaleur si lourde que mon petit sac qui pèse dix kilos aurait paru en peser le triple et... seule, c'est-à-dire sans personne à faire chier pendant mes pétages de cable ; au bon comme au mauvais sens du terme!

(Une petite parenthèse pour dire que même si c'est une des meilleures vues que j'ai jamais eue pour écrire, c'est aussi un des endroits sur terre où il y a le plus de moustiques et bêtes qui piquent en tout genre... Résultat, j'écris par intermitence : je passe un tiers du temps à me gratter, le second tiers à me lamenter sur l'état de mes bras et de mes jambes qui ressemblent plus à un serpent en mue qu'à des gambettes de pin-up, et le dernier tiers à écrire!)


Tony

Dowdi

Quoiqu'il en soit, quand j'ai appris que Sam le-Suédois-qui-parle-pas s'en allait dans les montagnes à 1h30 en voiture de chez Sammi et qu'en plus on venait le chercher, j'ai décidé de changer mes plans...

"Baboo's garden" est un havre de paix créé par Tony - un américain d'une soixantaine d'années - au sommet d'une des nombreuses collines de la région. Tony est arrivé ici il y a six ans, après la mort de sa femme et l'arrivée au pouvoir de Bush. Il a construit trois abrits en bois et feuilles de bananiers dans chacun desquels il a installé une tente, un sommier en bois et un matelas gonflable. Je récapitule : un lit, sous une tente, sous une petite hutte!

Le dernier abrit est sur le même principe sauf qu'il est en hauteur, un genre de donjon des tropiques! La structure en pierres et bois supporte dix-neuf marches qui mènent à une petite terrasse sur laquelle est installée la tente, et où j'ai amené une chaise pour pouvoir admirer le paysage et laisser monter l'inspiration...

Tony est malade : cancer du fois. Sammi m'a raconté que les médecins jamaïcains - ne pouvant rien faire pour lui - lui ont conseillé de retourner au Etats-Unis, mais il semblerait qu'il ait décidé de s'éteindre doucement ici. C'est un peu triste. C'est même très triste... Car il n'y a aucun doutes, Tony est Malade : il est très maigre et faible. Il passe le plus clair de son temps dans un large fauteuil inclinable sur la terrasse de sa chambre, ou dans un hammac sous le grand châpiteau où se rejoignent les hôtes pour converser, se détendre, ou manger. Il se lève peu et n'est plus capable de s'occuper de quoi que ce soit ici, il ne peut que superviser d'un oeil ce que fait son homme de main et seul employé Dowdi.

Dowdi a trente-et-un an et travaille ici depuis quatre ans. Il est jamaïquain et rasta. Le Baboo's garden c'est aujourd'hui toute sa vie, et plus encore depuis qu'il est la seule force de travail ici... Les deux gars dorment dans une maison construite "en dur" dans la clairière qui entoure le châpiteau ; près de la douche et des toilettes, des fils pour étendre le linge, du champ de manioc et de la petite famille de porcs. Pour tenir compagnie aux garçons au quotidien il y a également Brownie la maman chien et ses cinq adorables petits chiots de six semaines ainsi que papa et maman chat et leur deux rejetons ; Pois et Rayures.


The jungle!

Le visage...



J'y etais vraiment...

Dowdi est un solitaire. Quand il ne s'occupe pas du Baboo's garden il s'enfonce dans la jungle et grimpe chercher les cristaux dont il a besoin pour faire ses bijoux. Il est persuadé que ces pierres valent une fortune et vend une simple paire de boucle d'oreilles l'équivalent de 15$.

Moi je ne sais pas si elles valent de l'or ses pierres, mais elle sont ô combien précieuses, j'en suis certaine.

Car elle viennent du coeur de la jungle ; au sommet d'une colline, à environ mille mètres d'altitude, en plein centre de la Jamaïque. Et parce qu'il faut grimper plus d'une heure à travers les rochers, sous les lianes et au milieu des moustiques les plus voraces de l'île pour trouver la mine! Je le sais parce qu'il m'y a emmenée... Mais attention c'est un secret, j'ai juré de ne le dire à personne parce qu'on ne sait jamais que quelqu'un découvre le site et lui vole ses pierres!

J'ai néanmoins le droit de lui dédier un article "pour faire sa pub" alors tout va bien :)

Dowdi m'a emmenée là-haut certes, mais au prix de longues heures de négociation et de preuves que j'étais quelqu'un de confiance, d'honnête et de désinteressée. Je lui ai d'abord démontrée que j'étais dure en affaires : il voulait me vendre ses boucles d'oreilles mais n'ayant pas le budget pour me les offrir, j'ai proposé de les échanger contre une de celles que je fabrique moi-même, ce à quoi je rajoutais sept paires de crochets (la base de la boucle, ce qui s'accroche à l'oreille) et une poignée de perles nacrées...

J'ai eu quatre paires en échange!

Puis pendant deux jours entiers j'ai du insister : "oui, je veux toujours voir l'endroit où tu ramasses tes pierres", tout en faisant mine de n'en avoir soudain plus rien à faire ou d'être fatiguée de ce petit jeu. Il disait me tester, j'ai tenu bon, et au dernier moment, alors que nous étions déjà loin dans la forêt, il a décidé de m'emmener à la mine secrète...!

Je ne puis malheureusement en conter plus car sinon quelqu'un pourrait noter des indices, venir sur place et peut-être dérober ses pierres précieuses... ce qui ruinerait tout son business. Bon, OK, je peux juste dire que là-haut, dans la roche, on peut voir un visage et... un coeur!

Un joli coeur de pierre.

Voilà pourquoi ces cristaux - semblables à de l'ambre - valent si chers à mes yeux... Tant est si bien que j'ai pêché... J'ai un peu honte mais... j'ai échangé Oshun* contre un collier de Daudi. Enfin je tiens à préciser que ce n'est pas moi qui ai lancé l'idée, c'est lui! Oshun, déesse de la féminité et de la fertilité dans la religion afro-cubaine, est représentée par un collier de perles jaunes et dorées, et ces dernières perles l'intéressaient drôlement pour parfaire sa collection de bijoux printemps-été 2011! Dans un sens, ce qui n'est en soi qu'un ridicule collier de perles vaut, au point de vue pécunier, certainement beaucoup moins qu'un de ses pendentifs en cristal monté sur un collier de perles et graines exotiques. Et d'un autre côté, ce "vulgaire" collier de perle représente OSHUN : un déesse face à un caillou ramassé dans la montagne. Sans compter que je portais ce collier sans avoir reçu la main d'Orula, celle qui désigne l'Orisha qui nous représente, et sans avoir fait la cérémonie des colliers...

Bref, sacré dilemne...!

Alors, comme je portais illégitimement ce collier, que je pouvais m'en procurer un autre de retour à Cuba, que je ne pouvais pas me payer un de ces jolis pendentifs en cristal de la montagne et que d'un point de vue strictement financier le deal était en ma faveur (pour une fois), je décidais de faire l'échange.

J'ai maintenant le coeur de la terre sur ma poitrine.

Dowdi pense que c'est du quartz fumé et selon ses bouquins c'est pierre très puissante, efficace contre le stress et qui aide à surmonter les moments difficiles. Plutot saillant pour la gitAnne!



Baboo's garden c'est également un lever de soleil à couper le souffle : un léger brouillard logé à l'interieur des sommets moletonnés s'évaporant tout doucement dans une lumière saumonnée.


BINGO!!!


Puis il y a la communauté d'Accompong, à une dizaine de minutes en 4x4, et les jeunes du village avec qui j'ai joué au Bingo dans une petite bicoque trois soirs de suite.



Baboo's garden et Accompong c'est une grosse partie de mon voyage en Jamaïque, c'est beaucoup d'émotions, un paysage à couper le souffle, un peu de magie et beaucoup de tran-qui-li-té! :)

lundi 8 août 2011

Communauté d'Elim


31/07/11
Communauté d'Elim, province de Saint-Elizabeth, centre/sud-ouest de la Jamaïque.

16h45, la pluie vient cesser, c'était une pluie forte et dense, une pluie de mousson.
Je suis assise sur le lit dans la chambre de Sammi, face à la fenêtre. Le rideau vert est relevé par un simple noeud et la fenêtre est ouverte mais il y a un fin grillage pour protéger des moustiques. Au loin j'entends du dancehall bien lourd!

Sammi et moi

La petite maison dans la prairie à l'aube...

Gus (le grand) et Tiny (le petit)

Je suis arrivée ici vendredi soir, sous la pluie, à la tombée de la nuit. Sam m'attendait au bout de l'allée sous le porche avec ses deux chiens, j'ai eu l'impression de débarquer dans la "Petite maison dans la prairie" version tropiques. Sam est volontaire Peace Corps, une organistation Américaine très reconnue qui envoie ses recrues pour deux ans dans un pays. Le programme Peace Corps est réputé difficile et seuls 22% des volontaires vont au bout des deux ans. En effet, ces derniers vivent, le plus possible, dans les mêmes conditions que les communautés où ils sont envoyés et, à titre d'exemple, Sam qui vit ici depuis un an et demi n'a pas de machine à laver et a reçu un vélo, un fauteuil et une petite table il y a seulement 3 mois... sachant que quand elle est arrivée dans sa petite maison de deux pièces il y avait juste un lit et un frigo et qu'elle n'est payée que 250$ par mois.
A côté de cela, la maisonnette n'est rien que pour elle, elle a un immense jardin rempli d'arbres fruitiers où ont élu domicile de magnifiques perroquets verts et jaunes, et une vue splendide sur les collines. Par ailleurs il y a l'eau courante et potable ainsi que l'électricité. Et encore mieux : on peut jeter le papier toilettes dans la cuvette! Parce qu'à Cuba, le papier va dans la poubelle sinon ça bouche à coup sur... Pas d'eau chaude bien évidemment mais vu la chaleur on ne peut pas vraiment dire que cela fasse défaut.

THE piscine! :D

THE barbeuk :)

Ce soir là un autre couchsurfeur a débarqué : Nicolas, un péruvien qui travaille à Montégo Bay (au Nord-Ouest de l'île). Nicolas n'est pas ce genre de voyageur fauché comme nous, il est arrivé en pick-up avec du charbon, une grille, des saucisses, des steaks, du rhum, de la vodka, du jus d'orange et du Redbull!!!
Je fais une petite parenthèse ici : la nourriture est très chère en Jamaïque, je dirais que les prix dans les super marchés sont pratiquement les mêmes qu'en France. Par ailleurs, ce n'est pas forcément plus avantageux de manger dans la rue ; une "cajita" (petite boite en carton contenant du riz, du poulet et de la banane par exemple) vaut autour d'1€ à Cuba contre 4 ici! Ils disent que c'est parce que c'est une île et qu'ils importent tout mais aux dernières nouvelles Cuba est également une île et il n'y a pas ce problème. Bon, d'accord, je vous accorde qu'à Cuba il n'y a PAS de super-marchés en tant que tels, et qu'on ne peut de toutes façons PAS acheter des chips Lays ou des Kellogs ou du Coca-Cola ou de la viande de boeuf ou... Enfin attention, ne vous méprenez pas, il est possible de trouver tout cela à Cuba mais c'est le parcours du combattant et c'est aussi chers...
Autre chose EXTREMEMENT chère : les clopes! Un paquet de la marque Jamaïquaine Craven A (la moins chère) vaut 6$!!! Et hier on me vendait un paquet d'une autre marque pour 10$! Quand je pense que mes Hollywood me coûtent 1€ à Cuba... Du coup, bien évidemment les Jamaïqains n'ont pas le budget pour fumer des clopes, et quand on sait qu'un stick de weed pure fraîchement shéchée sur sa branche d'environ vingt centimètres vaut 2$, vous comprenez vite ce qui est le plus rentable à fumer!
Right?

Nicolas a réussi à allumer le feu sur le sol humide et nous avons passé une chouette soirée à manger nos saucisses à même le pic assis dans la remorque du pick-up, à trinquer aux cocktails made in gitAnne's, et à faire connaissance :)

Le lendemain nous avons profité d'être véhiculés pour aller se rafraîchir dans le meilleur "trou d'eau" du village. Un trou d'eau c'est quand un ruisseau qui coule plus ou moins sous terre s'élargit soudainement formant ainsi un bassin assimilable à une petite piscine naturelle. C'est vrai que le notre était de luxe ; il faisait environ quinze mètres sur cinq, l'eau était claire et le sol, de sable et de pierres.
Ensuite nous sommes allés manger au "cook-shop", Nicolas nous a ramenées et s'en est allé...
Le cook-shop est un des seuls "commerce" de la communauté. Je mets des guillements car ce n'est en rien une boutique, c'est juste une petite cabane où on peut aller acheter des cajitas, de la soupe et des espèces de beignets appelés "festivals". Comme ce cook-shop n'ouvre pas tous les jours il y en a un second ainsi qu'un endroit minuscule où on peut acheter les produits de première nécessité comme le riz ou les oeufs et pas grand chose d'autre. Mis à part cela, les premiers magasins dignes de ce nom sont à Santa Cruz à une demi-heure en voiture, et sachant que le voyage à Santa Cruz coûte 1,5$ et que le salaire Jamaïquain moyen est de 200$ mais beaucoup moins ici puisque nous sommes à la campagne, je me demandais si les habitants pouvaient réllement descendre en ville chaque semaine pour se réaprovisionner en nourriture mais Sam m'expliqua que, la plupart étant paysans, ils se donnent la nourriture! Non ils ne se la vendent pas ni ne se l'échange officiellement : ils se la DONNENT! D'ailleurs, en parlant de cela, comme nous sommes à court de nourriture, qu'aujourd'hui c'est dimanche et que demain c'est férié, Sam est justement partie faire un tour pour demander de la nourriture...

Hier soir un autre couchsurfeur est arrivé : Sam, Suédois, en vacances 10 jours en Jamaïque. Sam est le prototype physique du Suédois ; blond, très blanc de peau, avec des yeux bleux clairs. Il est un peu gros, a une tête de gentil nounours et parle très peu.
Mais la vraie nouvelle d'hier soir c'est la fête!
Hier a eu lieu la plus grosse fête de l'année : la fête d'Elim, où viennent des gens de tous les villages voisins et même de Santa Cruz...!
Il faut savoir que ce week-end est le week-end où il y a les plus grosses fêtes de l'année dans toute l'île et qu'à des endroits comme Negril à l'extrême ouest de l'île, les gens réservent depuis plusieurs mois... alors bien évidemment, perdus dans notre profonde campagne Jamaïcaine cette fête pourrait paraître complètement ridicule à côté de ce qui se passait sur la côte au même moment mais moi j'étai fière d'être ici à Elim! Oui j'étais fière, car je levais les yeux au ciel et voyais les étoiles, parce que je regardais autour de moi et les seuls blancs étaient les deux Sam et moi, parce que j'étais perdue en pleine campagne Jamaïcaine et que la plus grosse fête de l'année avait lieu dans un champ avec un énorme sound-system et un éclairage quasiment nul, parce que moi j'étais là à ce moment précis et que les basses des sons reggae ou dancehall envahissaient mon corps et le portaient, le balançant de droite à gauche sans que je n'aie à faire aucun effort!
Rhum aidant, j'ai un peu "wayné" (prononcer waïné, de l'expression "to wayne" qui caractérise les mouvements de hanches et de jambes si typiques du dancehall) et, comme je me suis plutôt lâchée, les jamaïquains ont halluciné!! Du coup, les uns après les autres ils venaient se coller derrière moi, attendant que je pose une main au sol et bouge les fesses... Bien sûr je ne suis pas allée jusque là, même si j'aurais pu, mais il me restait tout de même une once d'inhibition, et puis vu ma couleur de peau je préférais rester discrète autant que possible. Néanmoins, avec les gars que je connaissais, je me suis déhanchée comme JAMAIS je ne l'avais fait en public en France ou même à Cuba et... PUTAIN CE QUE C'EST BON DE POUVOIR SE LACHER COMME CA!! C'est tellement commun ici de danser en mimant les pires cochonneries sexuelles, haha...
Nan mais sérieusement, cela ne signifie absolument rien, c'est juste normal, naturel, et dès que tu te décolles le mec se recule et te laisse danser tranquille. En France, oh mon dieu, si tu te dandines ainsi tu passes pour une s*** dans la plupart des cas, et surtout, quand un mec commence à te coller il ne te lâche jamais...
Bon, et bien sûr ; je portais por l'occasion un "pum-pum short" - un short court et moulant - et j'appris que pum-pum ne voulait pas dire fesses comme je le pensais mais... vagin! C'est fin, c'est délicat, n'est-ce pas?!

En tous cas voilà, voulais de l'authentique, je voulais de la fête et du dancehall, j'ai eu les deux pour le prix d'un :)

Bienvenue...

Haïle Selassie




Oh j'ai pleuré, comme j'ai pleuré... Jamais je n'avais autant pleuré en atterrissant dans un pays : la Jamaïqe, j'étais en JA-MA-IQUE! Ce furent des larmes d'émotion bien sûr, parmi les plus belle ; l'émotion de fouler le sol d'un pays nouveau, d'un pays dont on a rêvé pendant des années, une destination si lointaine, si inaccessible. J'ai pleuré de solitude aussi... mais je n'étais pas triste d'être seule, j'étais triste d'être seule à vivre cela, triste de ne pouvoir partager avec personne, jamais, cette émotion.

Je suis là car, restant plus de deux mois en territoire Cubain, il me fallait sortir de l'île pour renouveler le visa. J'avais initialement prévu d'aller visiter une amie en Haïti, amie que je n'ai pas revu depuis que nous nous sommes quittées au Chili il y a bientôt trois ans, mais je ne trouvais pas de vol ni de bateau reliant les deux îles, de plus elle m'annonça qu'elle serait en République Dominicaine au moment où je pensais venir alors j'abandonnais...

Puis il y eu ce cours de danse en plein mois de mai où je faillis faire un malaise d'hypo-glycémie et de chaleur, cette boulangerie fermée, cette pizzeria libanaise où j'entrais à deux doigts de m'éffondrer, cet euro qui me manquait pour acheter une portion de pattes... et ce mec, tout seul au fond du restaurant, avec des dreads sous son bonnet, qui me proposa en anglais de payer cet euro manquant et de m'offrir en plus un coca.
Il était Jamaïquain par son père et de Sainte-Lucie par sa mère.
Je savais que la Jamaïque n'était pas loins de Cuba, j'y avais bien sûr pensé, mais m'arrêtant stupidement aux "on dit" j'avais hâtivement conclu qu'il était trop dangeureux pour une fille seule de s'aventurer là-bas et n'avais pas envisagé une seule seconde cette option sérieusement.
Puis j'ai revu ce gars, j'ai connu ses amis Jamaiquains de Paris, me suis rendue compte qu'ils étaient calmes et spirituels - rien à voir avec le vilain gangsta que je m'étais imaginée - j'ai trouvé ce vol incroyablement peu cher et surtout, je suis entrée en contact avec Janeen qui pouvait m'héberger à mon arrivée à Kingston et Sammy qui pouvait m'accueillir dans - selon ses dires - "une communauté absolument pas toursitique où elle est la seule blanche en pleine campagne Jamaïcaine" ... et j'ai tenté de ne pas me précipiter ... mais j'étais surexcitée : la vie est quand même dingue, tout semblait s'accorder pour m'indiquer que je DEVAIS acheter ce putain de billet d'avion et partir en Jamaïque ... Comment tant de hasard était-il possible?
Je n'ai toujours pas répondu à cette question mais j'ai acheté mon billet. Dix jours avant de partir à Cuba. Je n'y croyais absolument pas et c'était pourtant bien écrit sur mon billet : j'allais passer deux semaines en Jamaïque, pays de Bob Marley, du reggae, du vert-jaune-rouge... C'était un mythe, et cela allait devenir réalité!

Et je venais juste d'arriver, j'y étais, moi, la gitAnne, à Kingston. Rien que de prononcer ce nom dans ma tête et le laisser raisonner me faisait chialer.
Kingston, Jamaica.
J'avais l'impression d'être dans une chanson de raggae!

Dès l'aéroport les gens étaient cools, mais cools pour de vrai pas pour le style. Le mec de l'immigration puis celui de la douane me dirent bonjour en me regardant dans les yeux, me demandèrent si j'étais "all right" en écoutant attentivement la réponse, me souhaitairent la bienvenue en Jamaïque en articulant bien et sans cesser de me fixer, puis me dirent "have a good day". Et je me suis effectivement sentie la bienvenue! Ce n'était pas une simple formule de politesse, cela avait un sens : mademoiselle, vous êtes la BIEN VENUE en Jamaïque.

Merci :)


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